Vélomagus, récit d'un vélotafeur accidenté.

Les tracas administratifs

 
Quand on est victime d'un accident grave, on a du mal à réaliser ce qui nous est arrivé. Du coup, on vit beaucoup plus dans l'instant présent plutôt que dans l'anticipation. On goûte son bonheur d'être en vie et on panse ses plaies. Seulement la société, elle, suit son cours. Et elle se fiche royalement de votre état d'esprit.
 
Quelques jours après les faits, mon père commence les démarches auprès de mon assureur. Il s'agit donc d'une déclararation d'accident qui est actée en bonne et dûe forme.
 
De mon côté, j'enchaîne les arrêts de travails, pour les raison déjà décrites auparavant, mais il y a toujours quelque chose qui ne va pas. Pour donner un exemple concret, ma dent cassée a été signalée sur les arrêts mais l'Assurance Maladie me les a renvoyés en prétextant que le numéro exact de la dent était manquant. Autre exemple, il n'était pas précisé si c'était le genou gauche ou droit qui était blessé. Le tout sous peine de se voir refuser vos arrêts de travail et de rembourser les indemnités journalières. Quand on a des gros problèmes de mobilités, qu'il faut aller de nouveau chez son médecin pour cela (avec le délai pour la prise de rendez-vous) et qu'on est encore en train de se remettre d'un cataclysme, c'est dur. Pire, le délai de traitement de mes réponses à l'Assurance Maladie est tel que j'ai même reçu des courriers qui m'annonçaient que mon dossier d'accident du travail était définitivement clos. Au bout de quelques mois (c'est obligatoire et ça fait partie de la procédure), l'Assurance Maladie me convoque pour un contrôle par un médecin expert. Évidement, je me plie à cette obligation. Sans avoir spécialement d'appréhension (je n'avais rien à ma reprocher), je passe cet examen. Je suis accueillis par une médecin... glaciale. Pas enjouée, morne, austère. La pièce de l'examen est blanche et vide, j'ai l'impression d'être dans un interrogatoire. Tout à coup j'ai l'impression d'être devenu un voleur que l'on juge. Je suis ressortis de cet examen atterré, en me demandant si c'était la personnalité du médecin qui était à mettre en cause, ou l'Assurance Maladie qui impose cette austérité lors des contrôles.
 
Durant cette période également je reste en contact avec l'équipe qui mène l'enquête sur mon accident. Comme à notre premier contact, le brigadier en relation avec moi est toujours aussi bienveillant. Il a souvent été embarrassé de m'apprendre que concernant l'enquête, rien n'avait bougé.
 
Régulièrement, je téléphone à mon assureur pour leur demander le formulaire permettant de lancer les démarches d'indemnisation. A chaque fois, on me réponds qu'ils vont me le faire parvenir mais que rien ne presse puisque de toute façon l'enquête est toujours en cours.
 
Avant les vacances d'été je téléphone au brigadier pour savoir s'il y a du nouveau. Ce dernier m'annonce qu'après six mois sans avancée dans l'enquête, le procureur va certainement classer l'affaire sans suite. Ce qui pourrait paraître comme un abandon rapide n'est en fait qu'un mal pour un bien. En effet, on aurait pu ne pas classer l'affaire et la laisser trainer des années (en sachant qu'un classement sans suite ne veut pas dire qu'on ne peut pas la réouvrir). Sauf que les démarches d'indemnisations ne peuvent s'ouvrir que suite à ce classement. Puisque ces démarches d'indemnisation sont très longue, on comprends mieux l’issue de cette affaire. Petite précision, si tel était le cas ce ne serait pas mon assurance à qui on demanderait de m'indemniser mais au "Fond de Garantie". Pour résumer, quand on a une assurance, on paye tous un peu ce fond de garantie destiné à indemniser les personnes qui n'ont pas trouvé le tiers responsable du dommage. C'est le même pour toutes les assurances.
 
Et donc en septembre il arrive ce qui était prévu : affaire classée. Bon ça m'embête un peu mais c'est comme ça, j'ai appris à faire avec. Alors je contacte de nouveau l'agence de l'assurance pour entamer les démarches me permettant de transférer mon dossier au Fond de Garantie. 
Là la dame au bout du fil me rétorque "De quel sinistre parlez-vous monsieur?"
Moi "Attendez je rêve je vous ai appelé régulièrement à propos de mon accident grave et vous osez me demander de quel sinistre je parle ?"
Elle cherche, elle cherche... Puis me dit "Non Monsieur, aucun dossier de sinistre n'a été ouvert vous concernant, vous ne vous êtes pas étonné de ne pas avoir reçu de formulaire ?"
, je tombe des nues, je lui réexplique à quel point j'ai essayé justement de faire bouger les choses de leur côté sans jamais recevoir quoique ce soit. Elle me demande la date de ma déclaration d'accident qu'elle ne trouve pas. Je lui explique que c'est mon père qui s'en est occupé vu que j'étais à l’hôpital. Elle se contente d'un "Envoyez-moi la copie, et quand on l'aura on fera la démarche d'ouverture du sinistre".
 
Depuis le début de cette affaire, je me fais aider par une amie qui travaille pour une autre assurance et qui gère les cas de sinistre. Elle avait prévu que mon assureur ne bougerait pas d'un poil car ils sont coutumier du fait et même réputé pourcela dans le milieu des assurances. Sans entrer dans les détails, elle m'a aidé à rédiger le courrier pour le fond de garantie. C'était à l'assurance de le faire mais comme je ne leur faisais plus confiance, on s'est débrouillé par nous-même. Et nous avons eu raison car le fond de garantie nous a très vite contacté pour lancer les démarches. Le plus drôle c'est qu'ils ont demandé toutes les pièces justificatives aussi à mon assureur et qu'étrangement, tout à coup, il a été très rapide pour leur répondre. C'est tout de même un formulaire conséquent et long à remplir d'autant qu'il faut y adjoindre toutes les pièces justificatives. Cela m'a pris une bonne semaine chaque soir.
 
Pendant ce temps, je me suis également fait démarcher par une personne au nom de la société "Recours-indem". Par téléphone, elle m'explique qu'elle a eu mon numéro de téléphone via l'association d'aide aux victimes et qu'elle se met à ma disposition. En gros son job est de négocier les frais d'indemnisation auprès du fond de garantie en notre nom, en prenant 10% du montant final. Je lui réponds que pour l'instant je ne suis pas interessé. En fait, je suis méfiant et en colère envers l'association d'aide aux victimes qui n'avait pas le droit de transmettre mes coordonnées. J'appelle donc cette association qui tombe des nues en m'expliquant que non seulement ils ne sont pas autorisés à transmettre ce genre d'info à un tiers mais en plus elle n'a pas mes coordonnées vu que je n'ai jamais fais appel à eux.
Petit apparté, oui je n'ai pas fait appel à cette association car j'ai été beaucoup aidé déjà et je ne voulais pas monopoliser leurs forces alors que d'autres en ont plus besoin que moi.
La démarche de Recours-indem est donc illégale car elle s'est procurée mes coordonnées on ne sait comment. De plus, et c'est là le plus grave, elle essaye de se substituer à l'association d'aide aux victimes (dont c'est un des rôles de s'atteler à ce que la personne soit le mieux indemnisée) tout en prenant son 10% au passage alors que l'asso est gratuite.
 
Ce chapitre est long et peut-être un peu indigeste pourtant il est loin d'être exhaustif. Je pourrais écrire des pages entières de toutes ces déconvenues tellement j'en ai vue. Et je m'égare à penser à tout ceux qui ont eu moins de chance que moi et qui ont galéré, qui galèrent et qui galèreront.